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Le pays s’installe dans l’impasse

Le pays s’installe dans l’impasse
Le pays s’installe dans l’impasse

 

Yara ABI AKL | OLJ

 

Le blocage gouvernemental est là pour durer. Mieux encore : le pays s’installe petit à petit dans l’impasse. C’est ainsi qu’il conviendrait de résumer l’état des tractations en vue de la formation de la future équipe ministérielle. L’appel lancé hier par les évêques maronites pour redynamiser le gouvernement d’expédition des affaires courantes en est une preuve éclatante. D’autant qu’il est intervenu quelques jours après l’annonce par le président de la Chambre Nabih Berry de la tenue d’une séance plénière la semaine prochaine au Parlement.

À cela s’ajoute, bien entendu, l’attachement des protagonistes concernés par l’obstacle de la représentation des députés sunnites prosyriens au sein du futur cabinet. Sauf que durant la journée d’hier, le ton est monté d’un cran entre les parlementaires en question et la Maison du Centre.

Lors d’une conversation à bâtons rompus avec quelques journalistes à l’occasion du deuxième anniversaire de son élection, le chef de l’État Michel Aoun avait, rappelle-t-on, ouvertement critiqué la demande des députés sunnites antihaririens de prendre part au cabinet, dans la mesure où ils font partie de groupes déjà représentés. Une semaine après cette prise de position, les députés en question se sont réunis au domicile de Abdel Rahim Mrad (Békaa-Ouest) pour

réitérer leur attachement à ce qu’ils appellent leur « droit » à une représentation ministérielle. Étaient présents, outre M. Mrad, Fayçal Karamé (Tripoli), Adnane Traboulsi (Beyrouth), Jihad el-Samad (Denniyé), Kassem Hachem (Marjeyoun) et Walid Succariyé (Baalbeck-Hermel). L’occasion pour ces députés de s’en prendre violemment tant au président de la République qu’au Premier ministre désigné.

« Celui qui entrave (le processus gouvernemental) est le Premier ministre désigné, et celui qui le soutient dans cette campagne mensongère qui manque d’objectivité, et qui n’adopte pas des critères unifiés pour traiter avec les différentes composantes parlementaires », ont accusé les sunnites prosyriens dans un communiqué particulièrement virulent dont a donné lecture Abdel Rahim Mrad. Il a accusé le courant du Futur de « vouloir accaparer la représentation de la communauté sunnite ». « Notre demande de représentation n’est pas nouvelle, ce qui l’est, c’est que les responsables de la formation du gouvernement ne la prennent pas au sérieux, considérant qu’ils peuvent dépasser les parts qui leur sont allouées et les ententes passées », poursuivent les députés. Ils ont dans ce contexte indiqué que « pour faciliter les choses, nous considérons que le choix de n’importe lequel d’entre nous permet de représenter notre groupe ». Le communiqué reproche à M. Hariri, qui se trouve depuis la semaine dernière à Paris, d’avoir choisi « de bouder à l’étranger comme s’il n’était pas concerné par les dangers, économiques et autres », auxquels fait face le pays. En face, Fouad Makhzoumi, député de Beyrouth, a abordé ce sujet sous un angle un peu plus « calme ». S’exprimant à l’issue d’une rencontre avec Michel Aoun, il a reconnu en Saad Hariri « le représentant le plus fort des sunnites ». Mais il a toutefois souligné que « les résultats des législatives ont prouvé que les gens désirent le changement, et que le monopole (de la représentation) au sein des communautés n’est plus de mise ».

Face à la virulente attaque de ses adversaires, la Maison du Centre campe toujours sur ses positions : il n’est pas question que des proches de l’axe Damas-Téhéran fassent leur entrée au cabinet. Et Saad Hariri ne cédera pas au chantage du Hezbollah à ce sujet. Interrogé par L’Orient-Le Jour, un proche du Premier ministre désigné ne mâche pas ses mots : « Nous ne céderons pas. S’ils insistent pour inclure ces députés, qu’il désignent un autre chef de gouvernement. » « Ces députés constituent une provocation pour le public du Futur », dit-il, avant d’aller encore plus loin : « Saad Hariri ne reviendra pas avant que tous les obstacles entravant la naissance du cabinet ne soient aplanis. »

La relance des institutions

Sauf que le Hezbollah insiste toujours pour la représentation des sunnites pro-8 Mars, d’où la léthargie actuelle. Le cabinet semble donc reporté sine die. C’est ainsi qu’il conviendrait d’interpréter l’appel lancé par les évêques maronites à réactiver le gouvernement d’expédition des affaires courantes, « afin de régler les affaires de l’État et du citoyen (…) », comme on peut lire dans le communiqué publié à l’issue de la réunion mensuelle de cette assemblée à Bkerké. Stigmatisant « les ingérences étrangères » dans les tractations ministérielles, le texte appelle à « supprimer de toute urgence les obstacles se dressant devant la formation du gouvernement ».

Tout comme Bkerké, Aïn el-Tiné s’emploie à se montrer soucieux du bon fonctionnement des institutions en période d’inertie gouvernementale. À la faveur de cette logique, le président de la Chambre Nabih Berry a profité des audiences du mercredi pour défendre la tenue d’une séance parlementaire à l’ombre d’un cabinet démissionnaire. « Le Parlement est en session ordinaire et il est souverain », a affirmé Ali Bazzi, député Amal de Bint Jbeil, citant le président de la Chambre. Soulignant que le fait de légiférer est « nécessaire », M. Bazzi a déclaré sans détour : « Si certains veulent paralyser le pays, nous ne leur permettrons pas d’atteindre cet objectif. Et nous accomplirons nos devoirs constitutionnels et nationaux dans tous les domaines. »

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