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« Gilets jaunes » : des violences graves dans plusieurs quartiers de la capitale

« Gilets jaunes » : des violences graves dans plusieurs quartiers de la capitale
« Gilets jaunes » : des violences graves dans plusieurs quartiers de la capitale

 

Le Monde

La situation restait tendue en fin de journée, samedi 1er décembre à Paris, après une journée de mobilisation des « gilets jaunes » qui a donné lieu à de nombreuses violences et dégradations dans plusieurs quartiers de la capitale. Un calme précaire était revenu en début de soirée place de l’Etoile, point de départ de violentes échauffourées qui se sont étendues au fil de la journée dans la capitale.

Au moins 110 personnes, dont 17 membres des forces de l’ordre, ont été blessées, selon la préfecture de police. Ce bilan provisoire est bien plus lourd que celui de la précédente mobilisation à Paris le 24 novembre, pendant laquelle 24 personnes avaient été blessées, dont 5 parmi les forces de l’ordre. La préfecture a fait également état de 270 interpellations, soit davantage que pendant l’ensemble du précédent rassemblement parisien, où 103 personnes avaient été arrêtées.

« Mon parquet veillera à engager des poursuites (…) contre tous les auteurs des faits de violences et de dégradations constatées qui seront identifiés, et à ne pas laisser impunies les exactions inacceptables », a réagi le procureur de Paris Rémy Heitz.

L’instauration de l’état d’urgence a été réclamée samedi soir par le syndicat de police Alliance et suggérée par le syndicat des commissaires de la police nationale (SCPN) et Synergies-Officiers. « Nous étudierons toutes les procédures qui nous permettront de sécuriser plus encore. Tout ce qui permettra de sécuriser plus, moi je n’ai pas de tabou. Je suis prêt à tout regarder », a fait savoir le ministre de l’intérieur Christophe Castaner, interrogé sur BFM-TV sur l’opportunité d’instaurer ce régime d’exception, qui avait notamment été mis en place après les attentats terroristes de Paris de 2015, mais aussi après les émeutes de novembre 2005 dans les banlieues.

« Je n’accepterai jamais la violence »

Depuis le sommet du G20 à Buenos Aires, en Argentine, le président français a dénoncé ces violences. « Les coupables de ces violences veulent le chaos, ils trahissent les causes qu’ils prétendent servir. Ils seront identifiés et tenus responsables de leurs actes devant la justice (…) Je respecterai toujours les contestations, les oppositions, mais je n’accepterai jamais la violence », a déclaré Emmanuel Macron.

Interrogé sur TF1, le ministre de l’intérieur, Christophe Castaner, a lui dénoncé « une stratégie gérée par des professionnels du désordre, des professionnels de la casse ». Il a évoqué en début de soirée une situation désormais « plus apaisée », « mais pas totalement sécurisée » dans la capitale, et a lancé un appel aux « gilets jaunes » à se désolidariser des casseurs. « Le gouvernement vous tend la main (…) Protégez-vous, ne vous laissez pas embarquer par ces attaques (…) Celles et ceux qui ont encouragé à venir sur les Champs doivent aussi assumer leurs responsabilités », a-t-il dit.

De son côté, le premier ministre Edouard Philippe a décidé d’annuler son déplacement en Pologne, prévu dimanche après-midi et lundi pour le sommet sur le climat (COP24). En visite samedi soir dans une caserne de policiers, il a condamné les violences. « Les images qu’on a vues sont incroyablement choquantes. Et ces images, c’est rien par rapport à ce que vous avez vécu. Elles ne retracent pas la pression que vous avez subie. Et vous n’avez rien lâché, donc je veux vous remercier très sincèrement », a déclaré le chef du gouvernement à des policiers à la caserne Bessières (Paris XVIIe) dans une vidéo diffusée par Matignon.

Bâtiments incendiés et barricades de fortune

Véhicules et restaurants incendiés, magasins saccagés et pillés, forces de l’ordre et de secours prises à partie : du quartier de l’Opéra à la prestigieuse avenue Foch en passant par la rue de Rivoli, les scènes de chaos se sont répétées dans plusieurs quartiers huppés de la capitale, éclipsant le message porté ailleurs en France par des dizaines de milliers de « gilets jaunes ».

Une arme de type fusil d’assaut a été dérobée dans un véhicule de police dans le secteur de l’Etoile, sans que l’on sache si l’arme était ou non chargée. Dans plusieurs secteurs, des personnes cagoulées ont pris à partie des pompiers venus éteindre poubelles et véhicules incendiés, arrachant des vélos en libre-service et érigeant des barricades de fortune. Rue de Rivoli, une grille du Jardin des Tuileries descellée par des manifestants est tombée sur l’un d’eux, le blessant gravement. L’homme a été conduit à l’hôpital.

En fin de journée, la situation restait tendue et confuse dans plusieurs quartiers et des manifestants semblaient se diriger vers Bastille. Une vingtaine de stations de métro restaient fermées en raison des violences, a indiqué la RATP.

Cette troisième journée de mobilisation nationale des « gilets jaunes » réunissait quelque 75 000 manifestants samedi à 15 heures dans toute la France, selon un bilan du ministère de l’intérieur. La première journée nationale d’action, le 17 novembre, avait rassemblé 282 000 personnes, et la deuxième 106 000, dont 8 000 à Paris.

Des manifestations dans le calme, une préfecture incendiée

Lancé il y a quinze jours hors de tout cadre politique ou syndical, le mouvement des « gilets jaunes » s’est également poursuivie en dehors de Paris, le plus souvent dans le calme, même si des heurts ont aussi éclaté. Des manifestations ont eu lieu dans de nombreuses villes, comme à Lille, Rennes, Angers ou Bordeaux.

La préfecture de Haute-Loire, au Puy-en-Velay, a été incendiée lors d’un rassemblement qui a dégénéré, mais le feu était « circonscrit » samedi soir, a indiqué la préfecture. De violents affrontements ont aussi eu lieu dans le centre de Tours, faisant plus de 30 blessés dont un manifestant qui a eu la main arrachée. A Saint-Etienne, des casseurs ont tenté de pénétrer dans un centre commercial protégé par la police en marge d’un défilé de plus d’un millier de personnes.

A Nantes, une cinquantaine de « gilets jaunes » ont fait irruption à deux reprises samedi matin sur le tarmac de l’aéroport de Nantes Atlantique, tandis que de brèves échauffourées ont éclaté à Strasbourg. Plusieurs opérations de blocage et de filtrage étaient recensées, notamment dans le Var au péage de Bandol sur l’A50 et dans les Bouches-du-Rhône aux barrières de péage de La Ciotat.

Dans le Sud-Ouest, les « gilets jaunes » ont lancé des opérations « barrages filtrants » à Cahors (Lot), et dans sept villes du Tarn. Sur l’autoroute 9, les manifestants ont ciblé le péage du Perthus, à la frontière entre la France et l’Espagne. Les « gilets jaunes » appelaient également à cibler des institutions, en murant les centres des impôts ou en « aveuglant » les radars.

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